Ce que va changer la réforme du statut des travailleurs détachés

Un compromis semble avoir été trouvé par les ministres du Travail de l’Union européenne pour réviser le statut des travailleurs détachés. Il s’agirait de modifier cette directive européenne controversée datant de 1996 et qui n’avait pas connu de révision depuis.

L’objectif affiché de la démarche est la modernisation et l’adaptation des règles sur le détachement des travailleurs européens.

Le statut de travailleur détaché

Le statut de travailleur détaché permet à tout européen d’accomplir des missions ponctuelles dans un autre État appartenant à l’Union Européen au cours d’une période limitée.

Il faut que les niveaux de rémunération et les conditions de travail proposées au salarié respectent les pratiques en vigueur au sein du pays d’accueil. A titre d’exemple, un travailleur qui serait détaché en France ne peut percevoir un salaire inférieur au Smic et doit respecter la durée légale du travail en France.

Le nombre de travailleurs détachés a augmenté de façon exponentielle depuis la création du statut pour atteindre 286 025 contrats en France en 2015 selon les chiffres de la Direction générale du travail, ce qui nous place comme 2ème pays d’accueil au niveau européen.

Un statut sujet à controverse au niveau européen 

La principale source de tension concernant le statut des travailleurs détachés est le déséquilibre provoqué par l’élargissement de l’Union Européenne. Effectivement, cette dernière a accueilli 10 nouveaux pays en 2014, dont la plupart de l’Est de l’Europe, créant une amplification des écarts de rémunération entre pays membres.

L’écart de rémunération atteint ainsi un ratio de 1 à 10 entre le pays le plus riche (Luxembourg) et le plus pauvre de l’Union (Bulgarie) alors qu’il n’était que de 1 à 3 en 1996. Un écart que l’employeur peut tourner en sa faveur puisque le travailleur détaché continue de cotiser dans son pays d’origine.

Pour autant, tous les travailleurs détachés ne viennent pas nécessairement d’Europe de l’Est. Si les polonais constitue le 1er contingent de travailleurs détachés employés en France en 2015 avec 16,9% des contrats, les portugais se placent seconds (16,1%) suivi par les espagnols (15,7%).

La proximité géographique semble entrer en compte puisque belges (13,2%), allemands (11,8%), luxembourgeois (9%) et italiens (7,8%) viennent compléter ce trio de tête.

Salariés et entreprises voient pourtant dans ce statut une concurrence déloyale. De plus, on note une multiplication des abus liés au marché de l’emploi au sein de l’UE ces dernières années, notamment des rémunérations très inférieures, le dépassement des durées légales maximales de travail, des situations d’hébergement indignes ou encore le non respect des salaires minimums.

Les changements prévus

Les ministres du Travail de l’Union Européenne ont convenu que, sur un lieu de travail similaire, égalité de travail vaut égalité de salaire. Ainsi salarié national et travailleur détaché devront percevoir les mêmes primes, les mêmes remboursements de frais tout comme la même rémunération.

En outre, un changement doit être apporté à la durée maximale des missions qui sera désormais fixée à 24 mois. Au-delà de cette période donnée, l’application automatique du droit du travail du pays d’accueil devrait faire droit.

La France désirait que la nouvelle directive soit appliquée dans un délai de deux ans après sa ratification définitive par les pays membres de l’UE mais ce délai d’application a été maintenu à quatre ans, soit en 2022 au mieux. Cela n’empêche cependant pas les pays qui le désirent d’appliquer ces nouvelles règles avant sa ratification.