Comment rompre un contrat d’apprentissage?

Cadre de la formation professionnelle dans l’entreprise, le contrat d’apprentissage est un contrat de travail en alternance conclu en CDD ou en CDI entre un apprenti et un employeur visant à l’acquisition de compétences professionnelles sanctionnées par un diplôme ou titre reconnu. Il définit les conditions de l’exercice de l’apprenti dans l’entreprise et ses conditions de rupture sont encadrées.

En théorie, le contrat est censé prendre fin à son terme. Cependant, comme tout contrat de travail, chaque partie peut décider de le rompre avant son échéance. Pour l’apprenti comme pour l’employeur, la rupture du contrat d’apprentissage suppose de respecter certaines dispositions légales.

Quels sont les cas de rupture du contrat d’apprentissage ?

Pendant les 45 premiers jours (consécutifs ou non), la période dite probatoire, l’employeur ou l’apprenti peut solliciter la rupture du contrat sans avoir à justifier un motif précis. De fait, il n’est pas nécessaire de respecter un délai de préavis.

Après cette période probatoire, le fait de rompre prématurément le contrat d’apprentissage est soumise à certaines conditions. L’employeur et l’apprenti peuvent décider d’un commun accord ou par décision unilatérale de l’un d’eux de mettre fin à leur contrat d’apprentissage. Celui qui a l’initiative de la rupture doit se soumettre à des procédures bien définies.

Rupture du contrat à l’initiative du salarié

L’apprenti a la possibilité de rompre son contrat en déposant sa démission ou suite à une faute de l’employeur.

Durant la période probatoire, l’apprenti a le droit de démissionner sans préavis et sans justificatif précis. Passé ce délai, le contrat peut être résilié sous certaines conditions :

  • D’un commun accord entre l’employeur et l’apprenti. Ils doivent suivre la même procédure de notification que lorsque l’employeur prend l’initiative de la rupture.
  • Suite à l’obtention du diplôme ou du titre préparé, l’apprenti dispose de 2 mois pour le signifier par lettre écrite à son employeur.

L’employeur ne doit pas tenir compte des autres cas de démission. Sinon, l’apprenti peut se faire valoir ses droits à des indemnités, car l’employeur n’a pas correctement rompu le contrat. Dans ce cas, il peut solliciter la résiliation judiciaire du contrat.

Si l’employeur commet une faute ou des manquements récurrents à ses obligations, son apprenti a la possibilité de demander la rupture auprès du Conseil des Prud’hommes. Le Conseil peut prononcer la résiliation dans certaines situations, à savoir :

  • Les sommes dues ne sont pas réglées, selon les dispositions de la Cour de Cassation Chambre Sociale n°92-42.427 du 06 décembre 1995.
  • En cas de constatation que les conditions d’hébergement de l’apprenti sont insalubres (Cour d’Appel de Douai, du 30 nov. 2000)
  • En cas de violence (gifle) à l’égard de l’apprenti (Cour de cassation Chambre Sociale n°88-40.597 du 05 février 1992)
  • En cas de manquements récurrents aux dispositions règlementaires sur la durée du travail et l’interdiction du travail le dimanche et les jours fériés pour les apprentis de moins de 18 ans (Cour d’Appel de Versailles du 05 novembre 1999)
  • En cas de suppression de l’hébergement dont l’apprenti bénéficiait, par exemple dans le cas d’une serveuse (Jugement n°98-42.385 de la Cour de Cassation Chambre Sociale)

Cependant, jusqu’à la décision des prud’hommes, l’apprenti est tenu d’exécuter son contrat.

Contrats d’apprentissage conclus après le 01 janvier 2019

La loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » adoptée en 2018 a élargi les conditions de rupture du contrat d’apprentissage à l’initiative du salarié en introduisant une possibilité de démission.

Les anciens contrats ne prévoyait pas de possibilité de démission pour l’apprenti qui n’avait pour seul recours pour rompre son contrat que la saisie du conseil des prud’hommes dans des cas de faute grave de l’employeur ou de manquements répétés à ses obligations.

Les contrats d’apprentissage signés à compter du 01 janvier 2019 permettent à l’apprenti de démissionner suivant une procédure établie. Ce dernier doit saisir un Médiateur de l’apprentissage mandaté par la chambre consulaire dont il dépend pour engager la procédure de licenciement. Il a ensuite cinq jours pour informer son employeur par tout moyen conférant date certaine (recommandé AR, remise en main propre, etc.).

La rupture du contrat ne peut intervenir ensuite qu’après un délai minimum de 7 jours à compter de la notification par l’apprenti de son intention à l’employeur.

Rupture du contrat à l’initiative de l’employeur

Aucune indemnité ne sera versée au salarié en cas de rupture pendant la période probatoire, sauf stipulation contraire du contrat comme énoncé à l’article L.6222-21 du Code du Travail.

En cas de faute grave de l’apprenti ou à son inaptitude à exercer le métier, l’employeur peut mettre un terme au contrat. La faute grave est qualifiée si l’apprenti refuse de suivre les consignes ou son recrutement par un autre employeur à l’issue d’un arrêt de travail.

Un médecin ou un centre d’information et d’orientation (inaptitude professionnelle) valide cette inaptitude, après un examen de santé (inaptitude médicale). Cet examen est prononcé par une ordonnance du juge ou sur demande de l’employeur, de l’apprenti lui-même ou de son représentant légal ou du directeur du Centre de Formation des Apprentis.

On admet l’inaptitude professionnelle quand l’apprenti ne peut poursuivre la formation théorique dans le cas où il a échoué à son examen de première année et que son redoublement est refusé.

Après les 45 jours de période probatoire, la rupture du contrat est conclue selon les conditions suivantes :

  • D’un commun accord entre l’employeur et l’apprenti. Cet accord est constaté et notifié par écrit au directeur du centre du Centre de Formation des Apprentis (CFA), au responsable d’établissement où est implantée la section d’apprentissage, à la Chambre Consulaire ayant enregistré le contrat et à la Direction Départementale du Travail (DDT).
  • A la suite d’une faute grave ou une inaptitude à exercer le métier, une résiliation judiciaire peut mettre un terme au contrat. Cette résiliation est un jugement rendu par le conseil des prud’hommes qui a été saisi par l’employeur. Dans l’attente du jugement, l’employeur peut prononcer une mise à pied conservatoire vis-à-vis de son apprenti. L’apprenti peut bénéficier, durant cette période, de son salaire s’il a prouvé qu’il n’est pas, en fin du compte, à l’origine des causes de la rupture du contrat.

Si l’employeur n’a pas saisi le Conseil des Prud’hommes, il peut être passible de sanctions. Il est tenu de :

  • Payer les rémunérations dues jusqu’au terme (si entretemps, la date de fin du contrat est échue) ou jusqu’au jour où la résiliation judiciaire est prononcée.
  • Verser des dommages et intérêts à son apprenti en réparation du préjudice subi par la résiliation avant son terme du contrat d’apprentissage. Ce montant peut-être égal au salaire que l’apprenti aurait dû percevoir jusqu’au terme du son contrat.

Contrats d’apprentissage conclus après le 01 janvier 2019

La loi « avenir professionnel » a également modifier les possibilités de rupture du contrat d’apprentissage pour l’employeur pour les recrutements réalisés à compter du 01 janvier 2019.

L’employeur n’a plus l’obligation de passer par le conseil des prud’hommes pour résilier un contrat d’apprentissage s’il respecte les procédures de licenciement établies pour motif personnel ou disciplinaire en cas de faute grave, d’inaptitude de l’apprenti ou de force majeure.

Par ailleurs, la réforme établit que l’exclusion définitive de l’apprenti de son organisme de formation (CFA, UFA, SA) constitue pour l’employeur une cause réelle et sérieuse de licenciement pour motif personnel.

Dans le cadre d’une entreprise unipersonnelle, l’apprenti peut également être licencié en cas de décès de l’employeur maitre d’apprentissage.

Cas de rupture du contrat d’apprentissage par l’administration

La suspension ou la rupture du contrat d’apprentissage peut être décidée par l’administration lorsque l’employeur n’honore pas ses engagements ou que l’apprenti est mis en danger.

On parle de défaillance de l’employeur à ses obligations quand on constate des dépassements des horaires ou la violation de son obligation de formation, sans qu’il y ait mise ne danger de son apprenti. Le préfet a la possibilité d’interdire à l’entreprise d’engager des apprentis et exiger la rupture des contrats en cours. L’employeur devra verser les sommes que l’apprenti aurait dû percevoir jusqu’au terme de son contrat.

Si l’apprenti change d’employeur, le contrat est transmis automatiquement au nouvel employeur. Ce dernier devra effectuer une déclaration pour accomplir la formation des apprentis.

Le contrat peut être suspendu et rompu en urgence, en cas de risques majeurs d’atteinte à l’intégrité physique et morale ou à la santé de l’apprenti. Ces risques peuvent être :

  • Des sévices physiques ou brutalités et des sévices moraux tels insultes, humiliations, harcèlements moral ou sexuel
  • En cas d’expositions à des matières ou substances dangereuses sans les protections individuelles ou collectives, installations non conformes, conduites de machines dangereuses, infractions graves aux règlementations sur la durée du travail ou le travail de nuit…

Procédures de rupture du contrat par l’administration

L’inspection du travail ouvre une enquête. Le directeur départemental du travail, quant à lui, dispose de 15 jours pour statuer sur la rupture ou la poursuite du contrat. Pendant ce temps, l’apprenti pourra percevoir sa rémunération.

Si l’apprenti n’est pas autorisé à poursuivre son contrat :

  • S’il y a rupture du contrat, l’employeur devra verser à l’apprenti les sommes qu’il aurait pu percevoir s’il avait continué jusqu’au terme du contrat. Le directeur départemental a la possibilité de prononcer une interdiction temporaire de recruter des nouveaux apprentis ou de tout jeune en insertion professionnelle.
  • L’apprenti a la possibilité de réclamer la réparation du préjudice subi dû à la rupture anticipée de son contrat d’apprentissage.
  • Le titre de maitre d’apprentissage confirmé est résilié d’office si l’employeur en est le titulaire.

Reversement des aides perçues par l’employeur

L’état ou la Région peuvent verser des aides financières à l’employeur en échange de son engagement de formation d’un apprenti.

L’employeur est tenu de les reverser si le contrat d’apprentissage est rompu et qu’il a été reconnu en tort ou si l’administration en a décidé la rupture. Cela concerne l’indemnité forfaitaire reçue de la Région et les exonérations de charges sociales et le crédit d’impôt accordés par l’état.